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Nous avons passé en revue les principales opérations
sur les distributions, notamment, la dérivation, et puis un certain
nombre d'opérations qui sont déjà connues sur les fonctions
comme la multiplication, par les fonctions de classe C infini.
Et nous avons vu comment les généraliser au cadre des distributions.
Alors maintenant,
nous allons revenir sur le calcul des
dérivées au sens des distributions, et nous allons regarder une situation un tout
petit peu plus générale de celles que nous avons déjà rencontrées avec
le calcul de la dérivée de la fonction d'Heaviside.
Cette situation est un peu plus générale, portant le
nom de formule des sauts.
Nous allons commencer par l'étudier, dans le cas de la dimension 1.
Alors, on a déjà calculé la dérivée au sens des
distributions de la fonction de Heaviside définie sur la droite réelle.
Fonction H qui est définie par H de x égal un pour x positif ou nul, et H de x égal
zéro pour x strictement négatif. On a trouvé que au sens des distributions,
la dérivée de H est égale à la masse de Dirac en zéro,
égalité qui vaut dans D prime de R au sens des distributions sur R.
La fonction H présente une discontinuité de première espèce,
c'est-à-dire, un saut au point x égal à zéro.
Et c'est ce saut au point x égal à zéro qui fait
apparaître une masse de Dirac dans la dérivée au sens des distributions.
Évidemment, si on ne disposait
pas du cadre des distributions, et qu'on voulait
se poser la question de calculer la dérivée
de la fonction d'Heaviside, eh bien on dirait
que cette fonction, elle est dérivable sur R étoile.
C'est-à-dire, en tout point de la droite réelle, moins l'origine.
Et évidemment, pour tout x différent de zéro, H
prime de x existe au sens classique des dérivées.
H prime de x vaut zéro.
Mais le cadre des fonctions ne permet pas de dire ce qui se passe en
zéro, alors que, évidemment la dérivée au sens des distributions permet
de quantifier le saut de H en zéro en disant que la dérivée
de H au sens des distributions, c'est la masse de Dirac en zéro.
Nous allons donc généraliser ce calcul. Alors, la formule des
sauts en dimension 1 s'énonce sous la forme du théorème suivant :
Soit f fonction de classe C 1 par morceaux de R dans R, présentant des
discontinuités de première espèce en un nombre phi de points que l'on va
noter a 1, et cetera, a n, qui sont ordonnés de façon strictement croissants.
Donc, a 1 strictement inférieur à a 2, inférieur, et cetera, inférieur à a n.
Alors, on peut considérer la distribution associée
à f, à savoir, la distribution Tf,
puisque f étant de classe C 1 par morceaux sur R, elle est localement intégrable.
Donc, la dérivée de la distribution, Tf est la somme de deux termes.
D'une part, il va y avoir la distribution définie par la dérivée de f
au sens des fonctions, donc,
T de f prime. Et il y a un autre morceau qui est la
somme pour k allant de 1 jusqu'à n, de f de a k plus zéro, moins f de
a k moins zéro. C'est-à-dire du saut de f au point a k que
multiplie la masse de Dirac au point a k. Alors, on rencontre parfois la notation
f prime entre accolades, pour désigner T indice f prime.
C'est-à-dire, la distribution définie par la fonction f
prime, ainsi que la notation f entre crochets, au
point a k pour désigner f de a k plus zéro, moins f de a k moins zéro.
C'est-à-dire, la limite de f à droite de a k, moins la limite de f à gauche
de a k.
Évidemment, puisque f est de classe C 1 par morceaux avec des
discontinuités de première espèce au point a 1, a 2, a n.
f est dérivable sur R privé des point a 1, a 2,
a n, et la dérivée f prime est une fonction localement
intégrable sur R qui est définie en tous les points de R, sauf a 1, a 2, a n.
Donc,
c'est une fonction qui est définie presque partout sur R.
Elle est même définie sur le même complémentaire
d'un ensemble fini, et c'est une fonction localement intégrable.
C'est pour cela qu'on peut définir la distribution T indice f prime.
Alors, démontrons cette formule, et cette formule des sauts en dimension
1 va résulter de la formule d'intégration par parties bien connues.
Alors, on prend phi, une fonction test arbitraire
sur R.
Donc, phi de classe C infini à support compact sur R.
Et nous allons calculer la dérivée de la distribution Tf appliquée à phi.
Par définition, c'est égal à moins la distribution Tf appliquée à phi prime.
Et toujours par définition, c'est égal à moins l'intégrale de moins
l'infini à l'infini de f de x, phi prime de x, dx.
Maintenant, faisons intervenir les points
de discontinuité de f.
Et on va découper l'intégrale de f phi prime sur la
droite réelle en faisant intervenir les points de discontinuité de f.
Donc, cette intégrale vaut moins l'intégrale de moins l'infini à a 1
de f phi prime, moins la somme, pour k allant de 1
jusqu'à moins n de l'intégrale de f phi prime sur le segment
a k, a k plus 1, moins l'intégrale de a n à l'infini
de f phi prime.
Maintenant, par hypothèse, dire que f est de classe C
1 par morceaux avec des discontinuités de première espèce au point a 1, a 2, a n.
Ça veut dire, en particulier, que la fonction f
se prolonge en une fonction de classe C 1
sur un voisinage du segment fermé a k, a k plus, pour tout k allant de 1 jusqu'à
n moins 1.
Et puisque tel est le cas, on peut calculer, par intégration par
parties, l'intégrale de a k, a k plus n, de f phi prime.
Donc, pour tout k allant de 1 jusqu'à n moins 1, ce qu'on trouve, c'est que moins
l'intégrale de a k, a k plus 1 de f de x, phi prime de x, dx, c'est égal à
moins f phi évalué entre a k et a k plus 1, plus l'intégrale de a k à a
k plus 1, de f prime phi.
Or, f phi évalué entre a k et a k plus 1, ce
n'est rien d'autre que f de a k plus 1 moins zéro, limite de f, à gauche de a
k plus 1, que multiplie phi a k plus 1, moins f de a k plus
zéro, limite à droite de f au point a k, que multiplie phi de a k.
Donc, moins l'intégrale de a k à k plus 1 de f phi prime,
ça donnera égal à moins f de a k plus 1, moins zéro phi
de a k plus 1, plus f de a k plus zéro, phi de
a k, plus l'intégrale de a k à k plus 1 de f prime phi.
Alors, on va traiter de la même manière, par intégration par
parties, les contributions mettant en jeu les intégrales allant jusqu'à moins
l'infini ou à plus l'infini.
Comme phi est à support compact sur la droite réelle, il existe un nombre réel
grand R positif, assez grand tel que moins R est plus petit que a 1 strictement.
Grand R est plus grand que a n strictement.
Et le support de phi est inclus dans l'intervalle ouvert
moins R, R. Et donc, l'intégrale de moins l'infini à a
1 de f phi prime est égale à l'intégrale de moins R à a 1 de f phi
prime, puisque que pour toutes le valeurs de x inférieures à R, f est nul.
Maintenant, on retrouve une intégrale sur un segment.
Segment au voisinage duquel f est de classe C 1.
On peut
intégrer par parties, et à nouveau, on trouve
que cette intégrale vaut moins f phi évalué entre
les bornes moins R et a 1, plus l'intégrale de moins R à 1 de f prime phi.
Et si on calcule le terme tout intégré, on voit
qu'il vaut moins f de a 1 moins zéro, donc,
limite de f, à gauche de a 1 fois phi de a 1, plus l'intégrale de moins R à a
1 de f prime phi.
Mais bien sûr, cette dernière intégrale,
on peut la compléter jusqu'à moins l'infini
pour trouver que l'intégrale de moins l'infini à a 1 de f phi
prime est égale à moins f de a 1 moins zéro, phi de
a 1, plus l'intégrale de moins l'infini à a 1 de f prime phi.
De la même manière, on montre que pour
l'intégrale qui fait intervenir la borne plus l'infini,
eh bien, moins l'intégrale de a n à plus l'infini de
f phi prime est égale à f de a n plus zéro,
limite de f à droite de a n, fois phi de a
n, plus l'intégrale de a n à l'infini de f prime phi.
Maintenant, lorsqu'on somme membre à membre toutes les égalités que
l'on vient d'écrire, on s'aperçoit que la dérivée de la distribution Tf appliquée
à phi, dont on a dit qu'elle était égale à moins l'intégrale de moins
l'infini à 1 de f phi prime, moins la somme de k égal 1
jusqu'à n moins 1 de l'intégrale de f phi prime sur a k, a
k plus 1, moins l'intégrale de a n à l'infini de f phi prime.
Eh bien, cette somme est égale à l'intégrale de moins l'infini à
a 1 de f prime phi, plus la somme de k égal 1,
jusqu'à n moins 1 de l'intégrale de f prime phi sur a k, a k plus 1.
Plus l'intégrale de f prime phi de a n à plus l'infini, plus
évidemment, la contribution des valeurs au bord de f au point a k.
Cette contribution s'écrit comme la somme pour k allant de
1 jusqu'à n, de f de a k plus zéro,
moins f de a k moins zéro, phi de a k.
Alors, maintenant, lorsqu'on met bout à bout toutes les intégrales ci-dessus,
on aboutit à l'intégrale de moins l'infini à l'infini de f prime phi d x, plus
évidemment, la somme de k égal 1 jusqu'à n, de f de a
k plus zéro, moins f de a k moins zéro, phi de a k.
Mais ça, par définition, ça s'écrit
comme la somme de Tf prime appliquée à phi, et l'intégrale de moins l'infini
à l'infini de f prime phi, plus la somme de f de a k plus zéro, moins
f de a k moins zéro, fois phi de a k que l'on écrit comme la
masse de Dirac au point a k, évaluée sur phi, k variant de 1 jusqu'à n.
On a donc démontré de cette manière la formule des sauts
en dimension 1.
Voyons maintenant comme cette formule des sauts s'interprète.
Donc, je reprends ma fonction petit f de R dans R, de classe C 1 par morceaux avec
des discontinuités de première espèce au point a 1
inférieur à a 2, et cetera, inférieur à a n.
D'une part, dans le calcul différentiel classique, eh bien, on
considérait qu'une telle fonction est de classe C 1 sur le
complémentaire dans R des points de discontinuité a 1, a 2, a n.
Et donc, le calcul différentiel classique s'intéresserait à la fonction
f prime qui à x, associe f prime de x,
qui est définie dans le complémentaire des points de discontinuité
a 1, a 2, a n, sur la droite réelle.
Au sens des distributions, on voit qu'on a un résultat complètement différent.
La théorie des distributions
a, elle, au lieu de considérer la fonction f, elle considère la
distribution Tf qui est définie à partir de la fonction localement intégrable
f, et elle montre que la dérivée de cette distribution, la dérivée
Tf prime, au sens des distributions, c'est la somme de deux termes.
Le premier terme, c'est la distribution qui est définie par f prime.
Finalement, c'est la dérivée au sens des fonctions à laquelle il faut ajouter
une combinaison linéaire finie de masse de Dirac au
point de discontinuité a 1, a 2, a n.
Autrement dit, le calcul différentiel classique ne s'intéresse qu'à la partie
Tf prime de la dérivée au sens des distributions de la distribution
Tf, de sorte que cette approche ne donne accès qu'à une information
incomplète sur les variations de la fonction f qui elles, sont codées
par la dérivée au sens des distributions de Tf.
Alors, voyons un cas particulier classique.
Considérons f, une fonction de classe C 1 par
morceaux avec un nombre fini de discontinuité de première espèce.
Alors, la formule des sauts permet de montrer
très simplement l'équivalence suivante: f est une fonction en
escalier sur R, si et seulement si, la
dérivée au sens des distributions de la distribution définie
par f.
Autrement dit, si la dérivée au sens des distributions de
Tf est une combinaison linéaire finie de masse de Dirac.