Bonjour. Bienvenue au MOOC : Restructuration des quartiers précaires des villes africaines. Notre vidéo d'aujourd'hui est consacrée aux programmes d'amélioration des quartiers précaires, à travers l'exemple du Maroc. Au cours des dernières décennies, plusieurs pays du continent ont entrepris, dans le cadre de programmes ciblés, d'améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers précaires. Les efforts et les moyens consacrés sont inégaux, et cela justifie amplement les écarts dans les résultats atteints ici ou là. Selon les Nations unies, on peut considérer qu'en 2010, la Tunisie avait éradiqué le phénomène depuis déjà plusieurs années. L'Égypte et la Libye ont diminué de moitié le nombre total d'habitants des quartiers précaires en zone urbaine, le Ghana, le Sénégal et l'Ouganda avaient réduit d'environ 20 pour 100 la proportion d'habitants des quartiers précaires. Au Nigéria, on est passé de 75 pour 100, en 1990, à environ 61 pour 100 en 2010. Le cas du Maroc est exemplaire, et il est l'objet de la vidéo d'aujourd'hui. Ce pays s'est en effet lancé, entre 2004 et 2010, dans un programme appelé Villes sans Bidonvilles, avec un fort engagement politique, la mobilisation de moyens importants et une stratégie claire en matière d'intervention. Je vous propose donc d'examiner cet exemple, suivant les 5 points que voici. Dans un premier point, nous reviendrons sur des données sur le pays ; ensuite, dans un second point, nous ferons une petite histoire du programme Villes sans Bidonvilles ; dans un troisième point, nous examinerons les cadres et les modes d'intervention, avant de voir ensemble le bilan, et les enseignements que nous pouvons tirer de ce programme. Le Maroc est un pays peuplé d'environ 33 millions d'habitants en 2014. Il a connu une urbanisation soutenue qui situe son niveau d'urbanisation à 62 pour 100 en 2011, et probablement aux environs de 75 pour 100 en 2030. Le pays connaît un déficit important en logements, environ 800 000 unités de déficit, et une forte demande qui s'établit aux alentours de 170 000 logements par an. Il existe un habitat insalubre sous plusieurs formes : l'habitat non réglementaire, l'habitat menaçant ruine, et les bidonvilles stricto sensu, comme on en a déjà parlé dans une précédente leçon. Le point de départ du programme Villes sans Bidonvilles est une directive royale, un discours du roi, le 20 août 2001, qui fait de la lutte contre l'habitat insalubre une priorité nationale. En 2004 est lancé le programme Villes sans Bidonvilles, dont l'objectif est d'éradiquer l'ensemble des bidonvilles, estimés alors à environ 270 000 répartis dans 85 villes. Très rapidement, les objectifs du programme sont revus à la hausse, et passent de 270 000 à 370 000 ménages et à 88 villes. Des moyens importants sont prévus, environ 25 milliards de dirhams, dont 10 sous forme de subventions de l'État marocain. L'originalité du programme marocain résidait en 3 points, essentiellement. D'abord, l'adaptation du contexte institutionnel et la révision des politiques d'habitat publiques, par le biais, notamment, de la mobilisation du foncier, la conduite d'une réforme fiscale, le renforcement du partenariat public-privé, et la création d'un fonds d'habitat social et d'un fonds de garantie. En second lieu, le programme a retenu l'ensemble du périmètre des villes comme zone d'intervention, avec l'élaboration de programmes intégrés de résorption et d'anticipation de nouvelles occupations. En troisième lieu, le programme a défini, de manière précise, les responsabilités des différents acteurs, responsabilités consignées dans un contrat formel qui fixe les engagements de chacun et les échéanciers de réalisation. Le bilan du programme peut être établi comme suit. Environ 400 000 ménages relogés, et ces relogements concernent également les ménages dont l'habitation menaçait ruine, c'est-à-dire environ 60 000 ménages. Ensuite, 51 villes sur 88 ont été déclarées Villes sans bidonvilles. Enfin, une reconnaissance internationale, avec l'attribution du prix des Nations unies, Prix Habitat en 2010. Le premier enseignement tiré de cette expérience est l'importance de l'engagement politique. Dans le cas présent, c'est au plus haut niveau que la décision a été arrêtée d'accorder la plus grande attention aux programmes d'intervention dans les quartiers précaires. En second lieu, nous avons vu l'importance de définir des programmes intégrés qui sont exécutés à l'échelle de la ville toute entière, contrairement à ce qui se faisait par le passé, où on intervenait sur des portions de ville, en notant ainsi la cohérence au contenu et aux activités qui étaient menées. L'accent a ensuite été mis sur le niveau élevé de participation des populations et des divers acteurs, ainsi que la nécessité d'accompagner les bénéficiaires, et particulièrement les plus vulnérables d'entre eux. Enfin, l'importance des contrats de partenariat ; des contrats qui précisent les engagements de chacun, les responsabilités de chacun, ainsi que les échéances à respecter pour donner toutes les chances de succès au programme engagé. Voici quelques images de la commune de Sidi Yahia, une commune rurale marocaine de la préfecture de Skhirate-Témara, dans la région de Rabat-Salé. La première image montre le quartier 2 ans après le recasement, et la seconde image représente le même quartier 6 ans après. On voit nettement la rapidité avec laquelle les habitations se sont développées, et cela grâce, notamment, à l'accession à la sécurité foncière des habitants. L'exemple du Maroc est instructif à plus d'un titre. D'abord, au niveau de l'engagement politique pour mobiliser l'ensemble des acteurs, l'ensemble des services de l'État et l'ensemble des partenaires. Ensuite, l'importance du choix de l'échelle d'intervention qui a partout été celle du périmètre de la ville, pour engager des actions intégrées les unes aux autres. Enfin, la nécessité de formaliser les relations et les interventions des différents acteurs dans des documents contractuels clairs, qui fixent les prérogatives, mais qui fixent aussi les délais d'intervention, pour des résultats sûrs et des résultats concrets. [AUDIO_VIDE]