[MUSIQUE] [MUSIQUE] Il est particulièrement intéressant de parler de social impact bonds dans le domaine de l'aide publique au développement, parce que depuis que cette aide publique existe, il y a un débat autour de la meilleure façon de lier le fiancement et les résultats. Classiquement, les bailleurs de fonds, qu'ils soient privés ou publics, apportent des ressources à des gouvernements, ou à des organisations non gouvernementales, par des subventions, donc par des prêts. Ces organisations les utilisent, en fonction d'objectifs qui ont été prédéfinis, mais, que les objectifs aient été atteints ou pas, n'a aucune influence sur les financeurs, et si les résultats ne sont pas au rendez-vous, tout le monde n'a que ses yeux pour pleurer. Il n'existe aucun mécanisme de sanction autre, qu'éventuellement, le fait de convaincre les investisseurs, ou les financeurs, de revenir ultérieurement. L'intérêt des social impact bonds, c'est de lier les deux, et d'intéresser la partie, soit en introduisant un élément de variabilité, par exemple dans le taux d'intérêts, soit qui va faire en sorte que, si l'on atteint les résultats, l'investisseur ou l'apporteur de capitaux ou le prêteur va percevoir une meilleure rémunération, parce que les résultats auront été au rendez-vous, et donc, les bénéficiaires auront eu le plein impact de ce qui aura été conçu, soit que la plus-value dégagée dans l'opération plus-value qui peut être économique et sociale, soit partagée, financièrement, entre toutes les parties prenantes de l'opération. Il existe de nombreux détails techniques, sur la façon de gérer un social impact bond, mais dans tous les cas de figure, le principe reste le même : on émet un titre de dette ou un titre de capital, avec une rémunération variable, qui est indexé sur un résultat économique et social chiffré, et qui modifie la rémunération des acteurs. Ce mécanisme très tentant, dans le domaine de l'aide publique au développement, connaît quand même un démarrage assez lent, lié à des difficultés extrêmement concrètes. Il faut des acteurs qui soient, en fait, de très bonne qualité, qui puissent s'engager sur des résultats. Or, le contexte des pays en développement, est souvent caractérisé par des administrations faibles, des acteurs qui ont des gros problèmes de capacités. C'est une caractéristique endémique aux problématiques de développement. On ne peut pas supposer des problèmes de construction de capacités résolus, pour mettre en place des instruments sophistiqués. Deuxièmement, la contractualisation juridique est très complexe, puisque, comme dans les partenariats public-privés, comme dans les phénomènes de concession, il faut s'entendre de manière très exacte sur ce que l'on veut atteindre comme objectifs, la nature précise des moyens humains, financiers, matériels, qui vont être mis en oeuvre pour atteindre ces moyens, et ensuite, mesurer de façon extrêmement précise la mise en œuvre du programme, mais aussi les impacts de ce programme, puisque on ne s'intéresse pas tant aux moyens mis en œuvre, qu'aux résultats effectifs et aux bénéfices que ces résultats effectifs génèrent, pour une collectivité particulière. On voit bien que cette chaîne est complexe. Elle est complexe économiquement, elle est complexe méthodologiquement, et elle va être très complexe juridiquement, puisque personne ne va accepter de s'investir dans de tels contrats, que s'il n'est pas parfaitement sûr de chaque microterme de l'ensemble de la trajectoire. Ceci explique que, ces produits ont été, pour l'instant, très expérimentaux. On en a vu quelques uns, par exemple, en Afrique orientale, dans le domaine de l'appui au développement rural. Mais leur développement va prendre, sans doute, beaucoup de temps, il sera réservé sans doute, à des catégories, à des segments de l'aide publique au développement, sur lesquels on peut avoir une assez grande sûreté, sur l'ensemble de ces domaines, donc soit des pays qui sont déjà relativement sophistiqués, soit des parties d'administration dans un pays qui est plus en avance que les autres, des pays qui sont, également, très confiants dans les mécanismes de contractualisation avec des acteurs privés. Ce n'est pas si fréquent que cela il y a beaucoup de résistances idéologiques et politiques à travers ces mécanismes, qui renvoient, quand même, à du partenariat public-privé. Ce qui n'est pas toujours admis. Et il va falloir, également, des objets qui produisent des résultats économiques et sociaux suffisamment importants, et suffisamment mesurables, ce qui n'est pas toujours le cas, pour pouvoir créer un mécanisme d'adossement ou de rendement, ou de répartition, ou d'incitation, ou de rémunération, qui soit mesurable, acceptable, gérable par les différents acteurs. C'est donc un optimisme mesuré, dans l'expansion de ces outils, que l'on peut pressentir aujourd'hui. On peut imaginer que les secteurs dans lesquels on va avoir sans doute, plus d'expérience qu'ailleurs, sont des secteurs où les impacts sont assez mesurables, et qui sont liés à des programmes avec des méthodologies clairement établies, on peut trouver ça, par exemple, dans le domaine de l'accès à l'éducation, ou de l'accès à la santé, on peut mesurer assez facilement, à la fois les cibles en termes de fréquentation de service, et d'extension de service, et ensuite, des impacts, soit sur le cognitif, soit sur l'état de santé, et transformer cela en économie. On pourra trouver cela, par exemple également, dans le développement rural, où il peut y avoir des indexes de production agricole, de productivité, dont on peut aussi déduire des bénéfices pour la collectivité. Et puis, bien entendu, il va falloir des pays qui, politiquement, sont intéressés par ces méthodes, et qui ont des administrations qui sont capables de gérer la plus grande sophistication de ces programmes, et donc fatalement, on va plutôt rencontrer ces situations dans les pays à revenus intermédiaires plutôt que dans les pays les plus pauvres. Dans des pays comme le Kenya, comme la Côte d'Ivoire, comme le Sénégal, et ce sera beaucoup plus difficile de faire ça en RDC, en Somalie ou en Centre-Afrique, comme on peut l'imaginer. [AUDIO_VIDE]